Dossier du Mois –> Avril 2024

Le printemps arrive, les insectes aussi !

Malgré le froid matinal de ces derniers jours, les parasites externes font leur grand retour : mouches, culicoïdes, tiques … au-delà de la gêne occasionnée pour les animaux et les éleveurs, ils peuvent être vecteurs de maladies. Quelles sont les différents moyens de maitrise à votre disposition ?

Une larve tuée en avril, c’est un million de mouches en moins l’été !

Les mouches sont très prolifiques. Par exemple, la mouche domestique dont la durée totale de vie est de 2 à 3 semaines, peut pondre au stade adulte entre 600 et 1 000 œufs. La durée de développement de l’œuf en larve, puis en adulte, dépend de la température et de l’humidité : elle est de l’ordre de 12 jours à 25-30 °C. Pour cette raison, la gestion des premières générations de mouches au printemps est capitale. 90% des mouches présentes dans un élevage proviennent de ce même élevage même si par ailleurs les mouches sont capables de se disperser en volant à des distances jusqu’à 8 km de leur lieu de naissance.

Et vous avez 3 leviers d’action :

  • Agir directement sur la population de mouches ;
  • Agir dans l’environnement des vaches ;
  • Agir sur les animaux.

Sur les mouches, la destruction des insectes adultes est souvent la solution retenue mais l’action sur les larves (« asticots ») est de loin la plus efficace.

Afin de limiter les populations de mouches, l’utilisation de larvicides est conseillée, surtout si l’hiver n’a pas été suffisamment froid. Les larvicides sont à appliquer sur les litières en privilégiant les zones non-piétinées par les animaux (bordures d’aire paillée, sous les abreuvoirs…), dans les fumières et les fosses à lisier. Il est également possible d’utiliser un adulticide mural sur les surfaces où se posent les mouches comme les murs clairs, les cadres de portes ou de fenêtres… Il est possible d’agir sur la population de mouches également grâce à la lutte biologique. La lutte biologique consiste à recourir à certains prédateurs naturels des mouches domestiques pour limiter leur invasion de l’environnement. On ne cherche donc pas à éradiquer les mouches, mais à réduire leur population à un niveau acceptable. Un équilibre se crée entre les niveaux respectifs des prédateurs et des mouches. Cet équilibre doit être entretenu par l’ajout régulier de prédateurs, car ceux-ci n’envahissent pas le milieu. Il existe trois types de prédateurs : les mini-guêpes, la mouche du lisier ou l’acarien Terrapi.

Pour limiter le nombre de mouches, plusieurs actions, complémentaires entre elles, sont envisageables dans le bâtiment. La première source d’infestation provient des œufs présents dans la matière organique. Il faut donc commencer par curer et nettoyer tous les endroits qui peuvent l’être. L’objectif est de créer un environnement défavorable aux mouches. Les mouches n’apprécient pas les courants d’air : avoir des zones bien ventilées dans les bâtiments, en y disposant des ventilateurs, permet de limiter la population d’insectes. Par ailleurs, la brumisation permet de créer un environnement humide que les mouches vont éviter. Il est aussi possible de réaliser un effet rideau avec une rampe de brume en entrée de salle de traite ou de parc d’attente, pour que les mouches n’y pénètrent pas.

Les appâts ou pièges représentent un révélateur de niveau de population et, ainsi, un indicateur de nécessité de traitement. De plus, ils peuvent être utilisés dans des zones où ces traitements ne peuvent pas être réalisés. Il existe une large diversité de solutions.

Le traitement des animaux peut compléter ce plan de lutte mais en aucun cas ne suffit à contrôler à lui seul la population de mouches. De nombreux insecticides existent pour les traitements contre les mouches : en application sur la ligne du dos (Pour-On) ou à pulvériser. Les Pour-On nécessitent un renouvellement toutes les 4/6 semaines. Les spécialités en pulvérisation ont plutôt une activité fugace. Leur efficacité dépendra du moment du traitement. Un éleveur qui ne traitera qu’en juillet aura un sentiment d’inefficacité, le nombre de mouches adultes dans l’environnement étant bien trop élevé.

L’emploi d’insecticides doit être réfléchi avec son vétérinaire dans le cadre du protocole de soins.

Pour rappel les mouches peuvent être vecteurs de maladies : la kératoconjonctivite infectieuse, les mammites d’été, la besnoïtiose (le taon également)

Les tiques, une menace à ne pas négliger.

Au délà de l’action spoliatrice, les tiques représentent un problème important en élevage car elles peuvent transmettre aux bovins infestés des agents pathogènes responsables de maladies potentiellement graves ou ayant des répercussions économiques sérieuses.

Les principales maladies transmises par les tiques chez les bovins sont la babésiose (ou piroplasmose), la maladie de Lyme, la fièvre Q, l’anaplasmose et l’ehrlichiose.

Ixodes ricinus, qui est présente sur l’ensemble du territoire, vit dans les forêts de feuillus, les sous-bois, et on la retrouve aussi dans les pâtures entourées de haies ou proches de forêts. Elle est particulièrement active au printemps (avril-juin) et à l’automne (septembre-octobre). Les tiques présentent un cycle de développement faisant intervenir des hôtes extérieurs, sur lesquels elles prennent leur repas.

Une lutte raisonnée pour favoriser l’immunité naturelle

L’utilisation des agents chimiques dits « acaricides » permettant de tuer les tiques sur les bovins doit être raisonnée, en collaboration avec son vétérinaire. En effet, le contact régulier des animaux avec certains agents pathogènes peut leur permettre de développer une immunité naturelle. Il peut être opportun de favoriser le développement de l’immunité chez les jeunes en les faisant pâturer dans certaines pâtures identifiées comme à risque afin d’y réaliser un contact maitrisé avec les agents pathogènes.

Par contre, les animaux introduits qui sont de statut inconnu envers ces pathogènes, seront donc préférentiellement traités s’ils sont mis en pâture dès leur arrivée.

Afin de réduire la pression dans le milieu, entretenir les parcelles pâturées en broyant les zones de friches permet de limiter les populations. Décaler les clôtures situées à proximité des haies hautes évite que les tiques ne se laissent tomber sur les animaux depuis les branches en surplomb. En fonction de son parcellaire, les parcelles à haut risque peuvent être réservées à la fauche.

Dans le Maine et Loire, des cas de purpura hémorragique nous sont remontés tous les ans. Les enquêtés menées avec ONIRIS avaient mis en évidence la présence de tiques dans les parcelles pâturées dans le cheptel ayant eu des cas. Le pathogène d’Anaplasma phagocytophilum (agent de l’ehrlichiose bovine) serait impliqué mais cela reste toujours à ce jour à confirmer. Les éleveurs ayant mis en place des mesures envers les tiques ont peu ou plus de cas de purpura.

 

FOCUS MHE/FCO

Plus de 4 000 cas de Maladie Hémorragique Epizootique ont été déclarés depuis l’arrivée sur le sol français en septembre 2023 avec quelques cas isolés en Pays de la Loire. En parallèle, le Sud du massif Central a connu une vague de FCO sérotype 8 nouvelle souche sur la même période. Et dans le même temps également, la FCO sérotype 3 est arrivée aux Pays Bas avec des cas en Belgique, Allemagne et Angleterre.

 Un culicoïde est le vecteur de ces maladies. Dans ce contexte sanitaire, quels moyens avez-vous à votre disposition pour limiter le risque de contamination pour cette saison vectorielle ?

Les culicoïdes sont des petits moucherons. Les habitats favorables au développement des immatures (œufs, larves et pupes) sont nombreux : les bords de mare, les zones d’ensilage ou de stockage des litières/fumier, les bouses ou les zones de passage ou de sur-piétinement. L’activité est plutôt crépusculaire avec une durée de vie estimée de 15j à 1 mois. Ils vont piquer préférentiellement la partie basse du corps (ventre, membres)

Quelle est l’efficacité des moyens de désinsectisation sur les culicoïdes ?

La désinsectisation des bâtiments a démontré aucune efficacité pour baisser la quantité de culicoïdes au regard des nombreux gites potentiels. Sur les animaux, les résultats ne sont guère plus encourageants. La diffusion est maximale 4 jours après l’application du pour-on avec une efficacité de l’ordre de 45 % et elle disparait au bout de 7 à 10 jours. Cela ne semble donc pas une piste suffisante pour éviter la contamination des animaux. Les spécialités pour-on ont montré une difficulté de diffusion jusqu’aux membres des bovins, zone préférentielle des culicoïdes. La désinsectisation collective des animaux n’est donc pas un moyen de lutte efficace contre le culicoïde car elle ne peut être utilisée de manière continue. Elle est seulement préconisée à l’échelle individuelle sur un animal positif ou avant un mouvement.

Concernant les moyens de transport, la désinsectisation reste recommandée pour éviter une propagation plus rapide par le déplacement de culicoïdes infectés.

Mais alors quelles mesures préventives peut-on mettre en place ?

Il convient de mettre en place des mesures classiques de biosécurité c’est-à-dire :

-Avoir une bonne gestion des effluents, des litières et des zones de stockage de matière organique aux plus près des animaux qui pourrait réduire l’abondance des adultes et qui permettra également de réduire les gites des autres insectes.

Examen quotidien des animaux avec de pouvoir détecter rapidement des symptômes évocateurs de FCO/MHE

Avoir des animaux en bonne santé (dont une alimentation équilibrée). Dans le Sud-Ouest ils ont constaté que les troupeaux en bonne santé étaient bien moins touchés cliniquement par la MHE que les autres.

Confinement, autant que possible, pour les animaux malades ou virémiques au mieux toute la journée, ou à minima en période crépusculaire.

Il n’y a pas de vaccin pour la MHE à ce jour mais plusieurs vaccins existent pour la FCO type 8 et leur efficacité a été confirmée sur cette nouvelle souche. Il est donc fortement conseillé de protéger le cheptel souche pour cette saison vectorielle. N’hésitez pas à en parler à votre vétérinaire.